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  • Photo du rédacteurRodolfo Robatti

GROENLAND juin 2019 - Baie de Baffin - Latitude 75° Nord

Je me souviens, alors que je n'étais qu'un garçonnet de 6 ou 7 ans, de cette mappemonde posée sur une table basse du salon de notre habitation. L'enfant que j'étais, aimait faire tourner le globe sur son axe et le stopper de temps à autre, afin d'en observer un point en particulier. Le Groenland, territoire perdu dans le Nord de la sphère avait déjà attiré mon attention et faisait partie de ces endroits qui accrochaient régulièrement mon regard.

Au fil des années qui s'écoulèrent cette attraction s'amplifia à un tel point, que je ne pouvais porter mon regard sur un planisphère ou une quelconque représentation de notre monde, sans loucher en direction de cette vaste surface blanche.

Juin 2019, un demi-siècle et quelques heures de vol se sont écoulés et mon être se retrouve comme déposé sur une surface "vierge", peut-être un des points que l'enfant que j'étais, avait observé sur la mappemonde. Cette aventure a de particulier une absence quasi totale de projections ou de préjugés de ma part. En effet, si lors d'autres voyages j'emportais toujours un peu de mon imaginaire dans mes bagages, le Groenland, pourtant tant de fois remarqué, avait conservé intact son halo de mystères.

Pas de comparaisons saugrenues avec le connu; ici tout est question d'atmosphère, il ne s'agit pas seulement de ces paysages d'une beauté à couper le souffle ou de ces couleurs uniques qu'on découvre à ces latitudes et qui peuvent être restituées sur une photographie, pour peu que l'on ait un bon appareil photo et un minimum de talent...Non ici il s'agit de bien autre chose.

Au Groenland on peut observer un monde qui se transforme à une vitesse stupéfiante. La glace nous révèle bien des choses sur notre monde...ce qui se produit sur des centaines de millions d'année à l'échelle géologique, peut être observé ici en un laps de temps très court. Le détachement et l'éloignement de la côte de blocs de glace de taille gigantesque, leur dérive, leur érosion produite par les assauts de l'océan, du vent et la "chaleur" du soleil...la création, au sein de ces territoires de glace flottante, de véritables rivières qui terminent leurs courses en cascade dans l'océan. L'éclatement soudain d'un colosse de cette taille, l'explosion puis le fracas qui s'ensuivent ont généré chez moi des émotions d'une rare intensité.

Tout cela, indépendamment des impressions fortes qui s'imprègnent dans ma mémoire, m'amène à une réflexion plus rationnelle...Toute polémique mise à part, la disparition imminente et probablement inéluctable de cette portion du monde, devrait nous renvoyer, de manière plus générale, à la disparition du monde que nous connaissons ...Faire le deuil de ce monde qui n'existera bientôt plus sous ses formes actuelles me semble être un premier pas nécessaire dans le chemin de la compréhension de ce qui est en train de nous arriver.

Une vie dégénérée dans un environnement rabougris subsistera-t-elle pour les générations futures ? sans doute...reste que pour sauver ce qui peut l'être il faudrait au minimum du courage, de la détermination et surtout de l'empressement. Il y a urgence ! Chacun de nous doit se déterminer et agir. La complaisance et les paresses privées ne nous sont plus permises, au stade ou en sont les choses, elles devraient même être considérées comme criminelles.

Il est possible d'être à la fois radical et non-violent, il est possible d'être à la fois doux et déterminé et enfin il est possible d'agir pour le bien commun tout en préservant son identité, sa sensibilité propre et une partie de ses intérêts.

J'exprime cela afin qu'on ne me mésentende pas...une posture radicale ne nécessite pas forcément l'usage de la violence et je n'ai jamais dis ni écris que cela sera facile...

"Même les plus vaillants d'entre nous ont rarement le courage de ce qu'ils savent" FN








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